Il y a un nouveau shérif à Notthingham. Son nom : RYAN W. STEVENSON, son projet : ZOPP, son but: faire revivre et surtout faire progresser le rock de style Canterbury. Avec un deuxième album très attendu, intitulé justement ‘’DOMINION’’, RYAN offre un regard tout à fait British avec une musique contemporaine, riche et captivante. Les influences sont bien là : CAMEL, HATFIELD, SOFT MACHINE, mais aussi un peu GENTLE GIANT pour la complexité rythmique par moment et même BIG BIG TRAIN pour les tableaux plus folkloriques et pastoraux. Détrompez-vous rapidement car le style demeure unique, bien personnel et moderne. On applaudit l’addition de voix féminines et masculines et surtout de cuivres et flûtes ‘analogues’ sur 3 pièces. Je trouve que le prog est plus complet quand on y ajoute cette palette. Le travail de MONETA (ex-membre du groupe italien LEVIATHAN) à la batterie est tout aussi important. Un album surtout instrumental, diversifié qui comporte des passages subtils, trois courtes pièces plus ambiantes et deux pièces plus développées de 11 et 14+ minutes, ‘’DOMINION’’ saura plaire à plus d’un. RYAN montre l’étendue de son talent, tant aux claviers, qu’à la guitare. Il signe toutes les compositions et possède en plus une belle voix qui sied à ce style particulier de musique. Tous les morceaux contribuent au succès de l’album. Ce n’est pas un album concept proprement dit mais on retrouve une belle cohésion malgré tout. ‘Amor Fati’ ouvre le bal avec clin d’œil le plus Canterbury de l’album. Des chœurs mystiques, guitares troubadours, orgues sautillants et un fond mystérieux qui met la table pour le magnifique ‘You’ avec, au début, sa note de piano lancinante et répétitive, puis la batterie roulante et un thème ressenti et les cuivres solides un peu comme si HAKEN rencontrait BIG BIG TRAIN pour un voyage mystique en autobus dans la campagne anglaise. Un morceau classique qui mérite une mention pour la composition de l’année en prog. Allez écouter ça sans délai ! ‘Bushnell Keeler’ explore un terrain plus jazz avec des cuivres encore magiques et un thème rassurant, des flûtes, des orgues, des arpèges constamment en mouvement. Un autre très bon moment. MONETA y met du sien aussi. ‘Uppmarksamet’ est un interlude subtil, lent et majestueux avec un orgue simple et éthéré, puissant dans sa simplicité et très évocateur. Une grande beauté et une grande sensibilité en même temps. ‘Reality Tunnels’ est beaucoup plus bruyant et un bel exemple du style de RYAN avec ses motifs en mouvement, un orgue à la BANKS avec distorsion, une ligne de basse énergique et des ornements un peu médiévaux. Très riche en rebondissement. Un autre intermède un peu curieux suit. ‘Wetiko Approaching’ fait référence au virus de l’égoïsme, un terme amérindien que la nation CREE utilisait pour décrire le changement de personnalité de ses membres quand ils entraient en contact avec les hommes blancs. Une courte chanson avec une guitare et des échantillons sonores naturels. Plutôt expérimental mais cela nous prépare pour le dernier et le plus long morceau : ’Toxicity’, un feu roulant plus agressif, définitivement plus néo-progressif dans le genre UNITOPIA par exemple. Très bien structuré, rythmé à souhait, et semblant traiter aussi du risque de contamination des âmes par la vie moderne. Un autre morceau qui en révèle un peu plus à chaque écoute. En somme un album très bien fait, riche et captivant, qui montre que ZOPP est là pour rester. Très bien produit et enregistré et brillamment exécuté. À considérer déjà comme un prétendant aux meilleurs albums de la jeune année 2023. Une autre preuve élégante que le rock progressif est encore bien vivant.