AMOEBA SPLIT est une formation galicienne originaire de A Coruña, en Espagne, formée en 2001, et qui nous revient avec un troisième album en 2023, dont la conception débuta en 2021. Une formation qu’on classe souvent dans la catégorie fusion jazz et rock progressif, mais aussi dans la musique de Canterbury, ce qui s’explique probablement par les influences déclarées de ses musiciens qui vénèrent KING CRIMSON, SOFT MACHINE et CARAVAN. Mais à l’écoute de ce nouvel opus, on notera également des expérimentations avant-gardistes avec des traces de musique électronique. Cet album fait suite à leur premier album de 2010, le très apprécié et recommandable « Dance of the Goodbyes », et « Second Split » de 2013 qui fut également couvert d’éloges par les critiques spécialisés. Donc, une production rare mais de très grande qualité. Qu’en est-il pour la suite ? Voyons cela ensemble ! Les huit musiciens qui composent cette formation nous offrent un album plutôt court avec un peu plus de quarante minutes totalement instrumentales, pour un ensemble de six morceaux d’où émerge une très forte cohésion, mais chacun étant doté d’une personnalité forte, caractérisée par la présence des instruments à vents qui livrent des atmosphères relaxantes, « cool », « jazzy », mais souvent exubérantes et psychédéliques. Au niveau des atmosphères « fusion » proposées, on ressent rapidement une filiation stylistique forte avec le son « jazzy » typique des années 70, qui offre comme une plongée nostalgique dans cette vieille époque mais avec une magie créative qui modernise le tout par des enchaînements intéressants de bonnes idées et de sonorités modernes, mis en valeur par une production impeccable, car il est clair que ces talentueux musiciens sont obnubilés, et cela est très bien ainsi, par la qualité, et on ne peut que les remercier. Jamais dans l’excès ou la démonstration technique, les morceaux sont souvent livrés avec délicatesse et subtilité, mais aussi avec vigueur, dans une complexité mélodique et une folie mesurée propre et caractéristique à cette formation. Chaque morceau est un amalgame de styles. On passe d’une musique sérieuse et noble à un psychédélisme volubile dans « Quiet Euphoria », et dans « Shaping Shadows », d’une simple musique triste à une atmosphère jazz savoureuse très seventies, de toute beauté, douce et sage, et puis on accélère le rythme pour une finale en modulation de sons électroniques, entre modernité et nostalgie d’une autre époque. Les trois premiers titres impressionnent grandement. « The Inner Driving Force », en fait partie et se démarque avec sa trompette, ou son cor, comme s’il allait faire une grande annonce, et enchaîne dans un jazz psychédélique lourd où le claviériste livre une performance impressionnante, calquée par le saxophoniste, dans un duel amical et jubilatoire. « Divide And Conquer », étonnamment courte, offre une atmosphère plus lourde et bourdonnante, alors que sur « Thrown To The Lions » les saxophones s’expriment savoureusement en mode « vintage ». Pour compléter le tout, la pièce la plus expérimentale, « No Time For Lullabies », au doux piano, agrémentée de clochettes, où l’on ressent des émotions dans les silences, dans le calme, où l’on prend son temps pour créer des ambiances. On a droit à un charmant mélange de sonorités dans cette comptine. Cymbales, vibrations des instruments à vent, bruits de vieux jouets d’enfant, sax aux sonorités anciennes, bruits électroniques associés à des percussions libres et chaotiques, dans une expérimentation pas toujours accessible qui pourrait devenir rébarbative pour plusieurs, mais il faut prendre cet assemblage de sons, comme un rêve sonore où ces musiciens passent subtilement du coq à l’âne tout en restant gracieux et pertinent dans une poignante impression de forte nostalgie. Si vous aimez les albums qui s’apprécient et se dévoilent écoute après écoute, et qui vous absorbe pour un temps hors de ce monde, « Quiet Euphoria » en fait partie. Cette équipe nous a encore livré une belle œuvre étonnante, réfléchie, suave et divertissante ornée du sceau de qualité qui honore cette fine équipe. Fortement recommandable ! Titres préférés : Les trois premiers ! Bonne écoute !